TIC Mag publie la tribune libre du Dr Solve-Edwige AKAMBA. Cette fonctionnaire en service au ministère des Postes et Télécommunications revient sur le concept de l’économie numérique et soutient qu’il sort progressivement du simple slogan pour tendre vers la réalité au Cameroun.
L’Economie numérique conceptualise le secteur des activités économiques liées au numérique. Ces activités peuvent être basées sur des modèles économiques classiques ou nouveaux. Elle dématérialise l’économie, car elle effectue une migration de l’Economie physique vers l’Economie virtuelle. Au Cameroun le binôme est évoqué dans toutes les chaumières. Est-ce par mimétisme, effet de mode ou est-elle une réalité locale ?
Dans son adresse au peuple camerounais le 31 décembre 2015, le président de la République du Cameroun, a consacré tout un paragraphe à l’Economie Numérique. Il dit, concernant «le développement des infrastructures de communication et télécommunications » qu’il faudrait « Dans ce dernier domaine,( …) rattraper au plus vite notre retard dans le développement de l’Economie numérique.
Il continue et argumente en disant que, Celle-ci est un véritable accélérateur de croissance, en plus d’être une véritable niche d’emplois nouveaux pour notre jeunesse. Nous devons pouvoir en tirer avantage pleinement ». Le 10 février 2016, dans son traditionnel message à la jeunesse, Il a réitéré son intérêt pour la question.
Le concept d’Economie numérique, qui prospère sous d’autres cieux depuis plus d’une décennie fait son entrée chez nous « en grande pompe ». Son évocation dans tous les discours reflète-t-elle la réalité d’une politique générale implémentée en la matière au Cameroun ou alors un slogan de plus sans réel contenu et vide de substance ?
Les bénéfices
La notion Economie numérique est l’assemblage de deux termes plurivoques, dont l’économie, les télécommunications, la Communication audiovisuelle numérique et les Technologies de l’information et de la communication constituent le contenu.
Elle est un concentré de notions différentes qui, mises ensemble, influencent presque tous les secteurs d’activités. Cette transversalité agit non seulement sur les comportements, mais davantage modifie les modes de vie (achats, ventes, consommation, échanges, contacts…)
On parle désormais de commerce électronique ou d’e-commerce, de commerce mobile ou de m-commerce, d’ économie électronique, de nouvelle économie, etc.), que l’on tente d’englober dans une seule et même sémantique.
Que gagne-t-on à plonger de plain-pied dans ce type d’économie qualifiée à raison ou à tort de nouvelle économie ? Sur ce nouvel échiquier, où se bousculent les individus, les entreprises, les perpétuelles innovations les multiples réseaux que peut-on espérer pour un pays comme le nôtre ?
– Au niveau des entreprises la nouvelle économie s’illustre par la dématérialisation de l’économie où tout bascule désormais vers le virtuel. La conséquence immédiate est la productivité, la fluidité dans les transactions, la saine concurrence, l’innovation constante, entres autres.
– Au niveau des individus, la création d’emplois nouveaux, la formation permanente, la mise en exergue des compétences, l’ouverture sur le monde. La résultante de ces nouveaux process en fin ce compte est la croissance et par ricochet, l’amélioration du mode de vie des populations. La contribution totale de l’économie numérique à la croissance des pays est composée d’un effet direct via l’accumulation de capital numérique et l’effet indirect mesuré par la diffusion du capital numérique dans le système productif. En plein essor, l’économie numérique est un secteur stratégique de l’économie et sa contribution à la croissance des Etats est non négligeable.
Les enjeux
L’Economie numérique est aujourd’hui au cœur de la croissance et de la compétitivité des nations et des entreprises à l’échelle planétaire. Elle est devenue le secteur le plus dynamique de l’économie mondiale avec un taux de croissance double de celui de l’économie classique, dans la plupart des pays développés. Les pays du Sud qui ploient encore sous le joug de la fracture numérique, peuvent-ils se prévaloir des mêmes exploits ?
L’Economie numérique est le principal facteur de gain de compétitivité pour les économies des pays du Nord et représente désormais près de 30% de la croissance mondiale. Le marché du numérique a enregistré une progression mondiale de 4,3% en 2011 pour s’établir à 3070 milliards d’euros en valeur, a indiqué l’Institut de l’audiovisuel et des télécoms en Europe (Idate). Ce type d’économie, impose forcement de nouvelles règles, conventions et lois qui régentent les relations internationales. L’économie numérique a remis en cause et transformé en profondeur les processus de production, de distribution, de vente et de consommation des biens et services.
De nouveaux besoins, nés d’une offre de plus en plus agressive et diversifiée, ont vu le jour dans des domaines aussi variés que la santé (télémédecine), l’éducation (elearning), l’énergie et l’environnement, la culture (contenus numériques), le commerce (ecommerce) les médias et les loisirs (site web, blogs, réseaux sociaux divers etc.), la sécurité, la défense (réseaux fermés de télécommunications), les transports, les administrations et le secteur public (e-administration, open data), les services (e-services), les modes de production et l’industrie, l’informatisation et le management des entreprises ( e-management), la poste (e- center)…
Les perspectives
L’importance que revêt l’économie numérique exige que certains aspects y relatifs soient revisités. L’exécutif a l’air d’accorder un intérêt particulier au sujet. Il est donc nécessaire dans le cas du Cameroun, que le législatif prenne le relai, afin que soit aménagé un cadre légal et normatif, portant sur toutes les questions liées à cette l’économie. Cet encadrement sortira l’économie numérique du simple domaine du discours.
A cela, devra s’ajouter, la mise sur pied d’une régulation du secteur. Car, les missions de l’Agence de Régulation des Télécommunications (ART), de l’Agence Nationale des Technologies de l’Information et de la Communication (ANTIC), ou du Conseil National de la Communication (CNC) ne se rapportent pas à la régulation de l’Economie numérique.
Certains pays à l’instar du Sénégal ont tout un ministère de l’économie numérique. C’est la preuve de l’intérêt que revêt