Afrique : la course à la 3G est lancée

 

La croissance des services Internet se développe en Afrique à une vitesse extraordinaire. Aujourd’hui, plus de 500 millions de personnes ont accès à la 3G selon l’UIT qui estime que ce nombre atteindra les 3,4 milliards d’ici 2015.  Une prévision réaliste si l’on s’en tient aux chiffres fournis par une récente étude menée par le groupe Ericsson qui estime à 3 milliards le nombre de téléphones portables soit presque le double (1,2 milliard) du nombre de connexions Internet dans le monde. A terme, les connexions à Internet via mobile représenteront plus de 80% des connexions. Ce qui conférerait aux mobiles la position de  premier moyen de connexion à internet dans le monde.

L’Afrique n’est pas en marge de cette révolution puisque l’internet mobile est déjà entré en service dans une vingtaine de pays en moins de 4 ans. Alors que les réseaux filaires continuent de subir un net recul au profit des réseaux mobiles, malgré l’arrivée de l’ASDL, l’irruption du haut débit mobile, avec les offres 3G, vient encore creuser l’écart. En effet, le taux de pénétration des services de téléphonie fixe reste très variable. Il va de 32% dans certains pays d’Afrique du Nord à  3% seulement pour certains pays d’Afrique subsaharienne, ce qui explique largement les difficultés actuelles des opérateurs de téléphonie fixe pour moderniser les réseaux et pour proposer des services à valeur ajoutée via des offres ADSL.

Cette carence justifie largement la pertinence du déploiement des réseaux 3G et 3G+ qui commence à prendre forme un peu partout en Afrique.

Destinées à offrir de nouvelles applications mobiles comme la visiophonie, le transfert de données (films, musiques) à très haut débit et la télévision sur mobile, les offres THDM (très haut débit mobile) commencent à se généraliser chez la plupart des opérateurs africains. En revanche, pour plusieurs opérateurs, si la technologie n’est pas encore déployée, elle figure parmi les projets prioritaires à très court terme. Dès lors, il devient insensé de vouloir orienter les investissements sur les réseaux de deuxième génération (2G) de type GSM 900, largement diffusé en Afrique et dont la couverture géographique n’est pas encore assurée sur toute l’entendue du territoire. Ces réseaux représentent aujourd’hui représente 96% des abonnements en Afrique.

La démocratisation de la 3G connaîtra une progression très rapide. Certes sur les 547,5 millions d’abonnés au mobile que comptait l’Afrique à la fin 2010, seuls 2 % avaient accès aux services de broadband mobile mais au rythme des déploiements des réseaux 3G et des nouvelles acquisitions de licences dans les différents pays, la progression devrait aller très vite dans les deux prochaines années.

Déploiement de la 3G, les opérateurs en ordre dispersé
Le Sud-Africain Vodacom a été le tout premier africain avoir lancé son 3G avec la technologie HSDPA dès janvier 2004. C’est à partir de 2006 que commence le déploiement des réseaux 3G des opérateurs comme Libyana Mobile Phone ou Maroc Télécom.

En 2007, Vodafone Egypt lançait son réseau 3G basé sur la technologie UMTS 2100, en même temps que celui de Mobinil, déployé avec du W-CDMA dans un premier temps avant de se lancer dans l’UMTS en 2008.  

Partant de l’enseignement tiré des expériences européennes où les coûts d’attribution des licences 3G ont atteint des montants astronomiques, pénalisant ainsi fortement les capacités d’investissement des opérateurs, de nombreux pays africains ont adopté une démarche plus cohérente quant à l’attribution des licences 3G. Si certains y voient un moyen de stimuler la concurrence en facilitant l’introduction de nouvelles innovations technologiques, d’autres y voient, un moyen prélever une nouvelle taxe dont la gestion reste très opaque.

Loin de la bulle internet observée en Europe lors de l’attribution des licences mobile 3G, le continent africain a connu des situations différentes entre 2006 et 2010.

Licences 3G en Afrique, les premiers déploiements
De 578 millions de dollars payés par Mobinil en Egypte à la gratuité pour les opérateurs sud-africains, les situations changent d’un pays à l’autre. Pourtant, les stratégies nationales de fixation des prix des licences pratiquées ça et là devraient normalement permettre aux opérateurs acquéreurs des licences de pouvoir faire face aux investissements onéreux que nécessite  le déploiement des réseaux 3G.

Si au Maroc, le ticket d’entrée a été fixé à 40 millions de dollars pour chacun des trois opérateurs (Maroc Télécom, Meditel et Wana), l’opérateur historique tunisien a dû s’acquitter du double pour bénéficier de sa licence 3G. En fixant la barre à 151 millions de dollars pour chacun de ses opérateurs, le Nigeria est le deuxième pays africain où le coût d’acquisition de la licence est le plus élevé.  Globacom a lancé, fin décembre 2008, ses services de troisième génération (3G), devenant le premier des quatre fournisseurs GSM du Nigeria à offrir de tels services dans le pays.

Globalement, ces coûts élevés d’acquisition ne sont pas de nature à favoriser la démocratisation de la broadband mobile aux populations les plus démunies.

L’Algérie, quant à elle s’orienterait vers une politique d’attribution avec des prix bas, avec l’obligation faite aux opérateurs de reverser à l’État un pourcentage de leur chiffre d’affaires. Cette option permettra, à coût sûr, aux opérateurs de se lancer dans la 3G avec un investissement initial moindre. En tout état de cause, le coût de la licence détermine le prix des abonnements pratiqués par les opérateurs. De ce fait, les gouvernements ont tout intérêt à rendre accessible le coût des licences.

Afrique du Sud : licence gratuite
Actuellement, les investissements les plus importants ont été réalisés en Afrique du Sud du fait, justement, de la gratuité des prix des licences. Les opérateurs disposent de plus de cash leur permettant d’investir rapidement sur des technologies de dernière génération. Le pays dispose désormais de cinq réseaux 3G dont trois en AMRC et deux en AMRC HSPA. En 2008, l’Afrique du Sud présentait le plus important taux de pénétration de la 3G. A elle seule, elle représente près de 45% des connexions aux réseaux 3G en Afrique.

Maroc : coût exorbitant
A l’opposé, au Maroc, il faudra attendre six ans après l’attribution des licences pour voir le développement des services 3G. Certains analystes pensent que le coût exorbitant des licences a, un peu freiné, le développement des services 3G malgré la maturité du marché. C’est seulement cette année, que les services ont connu une croissance record. D’après les données fournies par l’ANRT (Agence nationale de régulation des télécommunications), le secteur des télécoms a enregistré au 1er semestre 2011, une forte croissance, de plus de 25,5%, pour se stabiliser à plus de 35 millions de clients abonnés au service mobile. Cette croissance profite aux trois opérateurs mobiles. A commencer par Maroc Telecom (filiale à 53 % du groupe Vivendi Universal). L’opérateur historique marocain a vu son parc d’abonnés mobile progresser de 16,5% par rapport à la même période en 2010. Maroc Télécom détient, aujourd’hui, près de 52% de part de marché avec 27,5 millions de clients. Arrivent ensuite  Méditel, détenu à 40% par Orange, avec ses 10 millions d’abonnés, soit près de 35% de part de marché et Inwi ( Bayn) avec un parc de clients de plus de 5 millions d’abonnés dans le fixe et le mobile 3G soit 13,5%.

Pour le régulateur marocain, cette dynamique du marché est le fait de la croissance entrainée par le développement des réseaux 3G et de l’ADSL qui fait croitre le marché. Pendant, la même période, le prix de la téléphonie mobile a connu une baisse sensible de 40%. Les baisses de tarifs ont également touché la téléphonie fixe dont le prix de la communication a été réduit de 14%.

Kenya : prix raisonnable
Au Kenya, le prix de la licence a été fixé à 10 millions de dollars pour chacun des trois opérateurs Airtel Kenya, Telkom Kenya (devenu Orange) et Safaricom (détenu par Vodafone Kenya Limited (40%), l’Etat (35%) et le  Public (25%)  ). Ce coût jugé raisonnable a permis le déploiement de réseaux 3G dès avril 2008 pour Safaricom et des réseaux UMTS pour Orange et Airtel.

Sénégal : concurrence attisée
Au Sénégal aussi, c’est à la suite de l’offensive d’Expresso (groupe Sudatel) que l’opérateur Orange (Sonatel) a fini par lancer à partir novembre 2010 son offre dénommée «Pass Internet Everywhere ». Celle-ci fournit une carte SIM à insérer dans un téléphone portable mais aussi, elle peut être utilisée à partir d’un ordinateur à l’aide d’un dongle USB compatible GPRS/EDGE/3G/3G+.

Tunisie : pressions des opérateurs
Quand à la Tunisie, c’est également suite aux pressions exercées par les opérateurs concurrents (Tunisiana et plus récemment Orange) que Tunisie Télécom qui ont lancé des services 3G que l’opérateur historique a enfin décidé de lancer une offre 3G, le 8 août dernier. Ce lancement fait suite au déploiement d’une plateforme basée sur une technologie HSPA+ reposant sur un backbone en fibre optique. Désormais les abonnés pourront accéder via des clés 3G à des débits de téléchargement pouvant atteindre les 42Mb/s.

Algérie : mal en patience
L’Algérie, pour sa part, vient d’annoncer la publication du cahier des charges pour le lancement des services 3G qui devrait intervenir à partir du premier semestre de l’année 2012. Si la dynamique autour des services de 3G mobile ne fait plus aucun mystère, les adeptes du très haut débit mobile (THDM), type 4G, devront néanmoins prendre leur mal en patience. En effet, le ministre en charge des Postes et des TIC a également annoncer que l’Algérie n’est pas encore prête pour se lancer dans le déploiement des technologies plus avancées types LTE (Long Term Evolution) tout en reconnaissant la faisabilité technique de cette option technologique. Mais au regard de l’importance de l’enveloppe budgétaire qu’aurait nécessité un tel passage, les autorités préfèrent orienter leurs efforts vers la 3G avec l’attribution prochaine de trois licences pour les trois opérateurs du marché : Djezzy, Nedjma et Mobilis.

En attente
A Madagascar, l’opérateur Airtel multiplie les tests après avoir installé les infrastructures dans plusieurs localités du pays. Quant à la Côte d’Ivoire, les consultations pour l’attribution des licences 3G sont en cours. Toutefois, le ministère en charge des TIC n’a pas divulgué les coûts d’acquisition de ces licences dont les bénéficiaires seront connus avant la fin de cette année. Un lancement qui a été retardé en grande partie à cause des événements postélectoraux qui ont secoué le pays durant ces derniers mois. Auparavant, la plupart des opérateurs avaient gelé leurs investissements du fait de l’issue incertaine de la situation politique qui prévalait depuis plusieurs années.

Faire du 3G avec du 2G mais gare à l’Autorité des télécoms
Eh oui, on peut faire du neuf avec du vieux comme l’explique l’adage. L’UIT considère les plateformes développées avec des technologies types EDGE et CDMA2000 1xRTT comme des technologies 3G du type télécommunications mobiles internationales (IMT). Toutefois, il arrive qu’elles soient considérées comme étant des technologies 2G. Certains opérateurs l’ont tenté à leur à leur dépens.  Ce type de situation a déjà été relevé au Congo, au Sénégal et en Egypte où des opérateurs surfaient sur le vide juridiques qui entoure la réglementation pour utiliser des services EDGE en proposant, en catimini, des services 3G.

En Egypte, l’Autorité de régulation a fini par sévir en exigeant des licences 3G pour les opérateurs disposant d’infrastructures basées sur la technologie EDGE. La 2.75G, couramment appelée EDGE, est une norme de téléphonique, située entre le GPRS et l’UMTS (3G). Ces normes sortant de cette génération utilisent un réseau téléphonique plus rapide, passant de 54kbps à 384kbps en moyenne.

MD

Evolution des réseaux 3G et couverture rurale

Dans son rapport dédié aux technologies pour l’accès et le service universelle, l’UIT rappelle que « les technologies 3G telles que le WCDMA, le HSPA et le CDMA2000 1xEVDO sont des évolutions naturelles des technologies 2G et 2,5G prévues pour l’accès mobile large bande à l’Internet ». De même, il est possible de remplacer le WCDMA par le HSPA (sous les formes de HSDPA et HSUPA), essentiellement en mettant à jour les logiciels.

Les régulateurs doivent se demander si l’accès universel à l’Internet risque d’évoluer de la même manière grâce à des mises à jour progressives et à l’extension géographique des capacités de réseaux existantes. S’agissant de l’accès Internet large bande, plusieurs possibilités font leur apparition.

Dans les pays en développement, des réseaux 3G sont parfois en place en zone urbaine mais souvent, ils ne couvrent pas les zones rurales ou isolées où leur rentabilité n’est pas établie. L’extension du service 3G à partir des centres urbains pour assurer une couverture nationale peut se révéler coûteuse en termes d’investissements et de subventions, puisque ces réseaux appellent une augmentation importante de la largeur de bande de l’infrastructure 2G/2,5G.

MD

Source : Agence Ecofin

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