[DIGITAL Business Africa] – L’amphithéâtre de la Croix-Rouge camerounaise abrite, du 25 au 27 novembre 2025, un colloque international autour du thème : « Droit international humanitaire et intelligence artificielle : perspectives africaines ». Chercheurs, praticiens humanitaires et spécialistes du numérique s’y penchent sur les mutations qu’impose l’IA aux mécanismes de protection des populations civiles.
L’une des interventions les plus marquantes de ce colloque a été celle du Dr TUEKAM TATCHUM Charles, enseignant à l’Université de Ngaoundéré. Son exposé, consacré à « l’usage de l’IA dans la documentation des violations des droits humains dans les conflits armés en Afrique » a suscité un vif intérêt.
Dès l’entame, l’universitaire a rappelé un principe fort : « l’intelligence humaine demeure le système le plus abouti », estimant que l’IA n’en constitue qu’un prolongement perfectionné. « J’exagère peut-être, a-t-il glissé, mais l’intelligence artificielle aujourd’hui est le système humain le plus abouti. »
Le chercheur a dressé un panorama sans concession des exactions qui marquent les conflits armés en Afrique : actes de torture, assassinats ciblés, violences sexuelles, usage d’armes prohibées, détentions arbitraires, destruction de biens civils… Autant de violations qui rendent urgente une meilleure documentation des faits.
Les débats ont rappelé l’importance de clarifier la nature juridique des conflits, qu’ils soient internationaux, non internationaux ou définis, selon une approche plus large inspirée du Traité de Vienne, comme des situations de violence prolongée entre groupes organisés.
Au cœur des échanges : une question centrale.
L’IA peut-elle fiabiliser et renforcer la documentation des violations des droits humains ?
Deux pistes majeures se dégagent :
La fiabilité technologique : l’IA peut-elle authentifier des images, vérifier des scènes de crime, aider à distinguer le vrai du faux dans un contexte de manipulation accrue des contenus ?
L’impact sur les dynamiques de conflit : des stratégies militaires aux opérations de désinformation, l’IA influence déjà le terrain. Mieux comprendre ces interactions devient indispensable.
Le Dr TUEKAM a insisté sur un point : l’IA peut devenir un levier puissant contre l’impunité, à condition d’être encadrée par une éthique rigoureuse. Citant Rabelais, il a rappelé la formule qui a servi de fil rouge à son intervention :
« Science sans conscience n’est que ruine de l’âme. »
Dans un contexte où les conflits armés en Afrique se complexifient, l’IA pourrait représenter un allié déterminant pour les acteurs humanitaires. Mais seulement si son usage demeure guidé par un impératif moral, humaniste et responsable. L’IA sans conscience n’est que ruine de la réputation, pourrait-on dire.
Par Loïc Souop








