L’après COVID-19: surmonter le double péril du nouveau coronavirus en Afrique centrale

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[Digital Business Africa – Avis d’experts – Par Antonio Pedro*]Ce n’était pas un cauchemar: cela est arrivé. Ce n’était pas le film « Contagion » de Steven Soderbergh (2011) ou un film de science-fiction où un personnage voyou déclenche une guerre biologique pour maximiser les profits. Ce n’était pas un cauchemar non plus! Cela  a réellement eu lieu.

Bill Gates l’avait prédit en 2015,  et avait indiqué que le monde n’y serait pas préparé. Ce n’était pas le cas! Une prophétie réalisée? Un Nostradamus du 21è siècle?

Mis à part les théories du complot, la pandémie a touché les riches et les pauvres, les pays développés et les pays en développement, les vieux et les jeunes, les légendes de la musique et les Premiers ministres et même un célèbre virologue comme Peter Piot, directeur de la London School of Hygiene & Tropical Medicine et l’un des découvreurs du virus Ebola; bref, nous avons tous été touchés et de manière apocalyptique!

Des mesures draconiennes ont été prises. Les États membres ont déclaré l’état d’urgence, des couvre-feux ont été imposés, des cabinets de guerre ont été établis, le confinement est devenu une norme et les soldats sont sortis des casernes pour faire respecter cette mesure. Et plus encore; les frontières ont été fermées, compromettant les moyens de subsistance des commerçants transfrontaliers informels, en particulier les femmes, et causant des ravages dans les pays en développement sans littoral tels que le Tchad et la République centrafricaine.

Des vols ont été suspendus et de nombreux avions sont restés cloués au sol. Deux de mes collègues sont restés bloqués à Brazzaville pendant environ un mois et, Inge, ma fille, étudiante en Afrique du Sud, n’a pas pu nous rejoindre à Yaoundé pour les congés de Pâques. Tragiquement, les restrictions de voyage nous ont contraints, moi-même et beaucoup d’autres à travers le monde, de ne pouvoir voyager pour aller voir des parents et rendre un dernier hommage à des êtres chers décédés au cours de cette période.

Instabilité macroéconomique accrue

Les prix du pétrole ont chuté en dessous de 20 USD le baril en raison de la dynamique de l’offre et de la demande ainsi que des guerres de prix entre la Russie et l’Arabie saoudite, aggravant l’instabilité macroéconomique dans les pays dépendants des exportations de pétrole. L’on peut en citer quelques-uns en Afrique centrale comme l’Angola, le Tchad, le Congo, le Gabon et la Guinée équatoriale.

Nous avons assisté à un Jeudi Noir, et sommes entrés dans un marché à la baisse avec des actions chutant de près de 30% en-deçà des chiffres records. Les entreprises ont déclaré faillites et des sauvetages massifs nous ont rappelé l’effondrement économique mondial et la crise financière de 2008 et l’histoire «trop grand pour faire faillite». La firme Boeing avait besoin de milliards d’aide pour survivre. Certaines compagnies aériennes se sont effondrées, l’IATA estimant les pertes de ce secteur industriel à 84 milliards de dollars en 2020.

Les usines sont restées fermées, les restaurants aussi. L’industrie des jeux et du divertissement a été durement touchée avec la fermeture des théâtres, des musées et des salles de concert. Le sport n’a pas été épargné non plus ; après une interruption de 3 mois, s’en sont suivis de rencontres surréalistes joués à huis clos sans spectateurs, à l’instar du derby Everton-Liverpool Merseyside qui, en temps normal, aurait attiré des dizaines de milliers de fans. À la consternation de beaucoup, en raison de l’interdiction de la vente de l’alcool pendant la période du confinement, et du manque de capacité de stockage, les sociétés brassicoles en Afrique du Sud ont dû déverser l’équivalent de 400 millions de bouteilles de bière, les détaillants ayant cessé de se faire livrer la bière.

Partout, des emplois ont été perdus, poussant de nombreuses personnes au seuil de pauvreté, notamment dans le secteur informel. Pour le 2è trimestre 2020, l’OIT a estimé une baisse des heures de travail mondiales équivalente à 305 millions d’emplois à temps plein. Elle a également indiqué que 1,6 milliard de travailleurs de l’économie informelle seraient fortement touchés par les mesures de confinement, en particulier dans les pays en développement dépourvus de filets de sécurité appropriés. La violence basée sur le genre a augmenté, les dépressions mentales également.

Les pays se retrouvent dans un gouffre financier

Les chaînes d’approvisionnement mondiales ont été perturbées, la domestication de la production et de l’approvisionnement a augmenté, ce qui a conduit les analystes à indiquer que le rythme de la déglobalisation était irréversible. Alors que les économies s’effondraient, la restructuration de la dette a dominé le discours politique, car le manque de liquidité financière risquait de plonger les nations dans un trou financier encore plus profond. Les sociétés de notation étaient présentes, plusieurs pays étant inquiets que tout mouvement précipité de restructuration de la dette ou un appel à l’annulation de la dette pourrait conduire à une dégradation du «statut indésirable», leur fermant ainsi l’accès aux marchés!

Tout comme en 2008, le débat cette fois-ci est également devenu alphabétique,[1] les économistes se demandant si la forme de la reprise économique serait un Z, U, V ou W, en d’autres termes, une frénésie de dépenses et un bref boom après la fin du confinement suivis d’une trajectoire de croissance au même niveau que lors de la période pré-pandémique (Z); un ralentissement lent suivi d’une lente reprise (U); une chute dramatique suivie d’une forte reprise (V); ou une reprise suivie d’une autre rétraction puis d’un deuxième rebond (W), respectivement. D’autres, inspirés par le logo