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Camtel/Minpostel : la guerre ouverte

Téléphonie mobile. Après huit années d’attente, Camtel voulait lancer ses activités dans le secteur juteux de la téléphonie mobile. Le gouvernement vient de l’obliger à plus de patience en annulant les procédures de recrutement d’un partenaire technique.

« Le Ministre des Postes et Télécommunications communique : l’avis d’appel d’offres international ouvert N°001 du 23 janvier 2012,

pour la fourniture, l’installation et la mise en service d’un réseau de mobile cellulaire lancé par le Directeur Général de la Cameroon Télécommunications (Camtel) est déclaré nul et de nul effet». Tel est le libellé du communiqué bref, mais sentencieux, signé avant-hier du ministre des Postes et Télécommunications, Jean-Pierre Biyiti bi Essam, et qui met fin au droit ou non de Camtel de lancer un réseau de téléphonie mobile en ce moment. Après l’appel d’offres de janvier dernier, sûr de son fait, Camtel avait même lancé, dans la foulée, un concours qui a pour objet la confection du logo, du slogan et de la charte graphique de la société Cmt. Sa. La charte, précisait le communiqué, devra expliquer les règles d’utilisation du logo et proposer des spécimens pour des documents Word (papier à en-tête, mémo, fax, etc.), des présentations PowerPoint, cartes de visite, communiqué de presse, sites Intranet & Internet, etc. Ce qui laisse croire que David Nkotto Emane avait prévu de démarrer les activités de Cmt. Sa dans un délai proche et à un rythme accéléré.

 

Interrogé au moment de l’appel d’offres par un confrère de la cyber-presse (Kiraword), le chef du département marketing de Camtel, Benjamin Gérard Assouzo’o, avait fait la précision suivante : « Nous n’avons plus besoin de compétition pour obtenir une licence d’exploitation du mobile, parce que la loi sur la communication électronique (promulguée en 2010) fait de Camtel un opérateur d’office éligible à l’acquisition d’une licence du mobile ». Ce que confirment des sources à l’ART. Selon ces proches du dossier, le principe de l’attribution d’une licence à Cmt. Sa est acquis. «Il est clair que parmi les prochaines licences, Camtel, via sa filiale mobile, en obtiendra une. Et de fait, avec les deux autres annoncées par le ministre des P et T l’année dernière, ce sont trois licences de téléphonie mobile qui devraient être attribuées, bientôt».

Refus du Minpostel de donner des explications

Seulement, dans ce qui apparaît comme une guerre ouverte entre le directeur général de Camtel, David Nkotto Emane, et le Minpostel, l’opérateur historique des télécommunications au Cameroun semble avoir manqué de patiente et a brûlé des étapes essentielles. Par exemple, l’entreprise publique n’a pas encore rempli quelques conditions de forme pour lancer sa filiale mobile. Au nombre de celles-ci, la mise en place des organes sociaux de Cmt. Sa. Car, s’il faut demander une licence, il appartiendrait aux responsables de Cmt. Sa de lancer des appels d’offres ou de demander les licences. Or, dans le cas présent, Camtel, actionnaire majoritaire, aurait pu mettre en place les organes de direction de Cmt. Sa (direction générale, conseil d’administration, siège, etc.) et charger ceux-ci de gérer les modalités de lancement, tels que l’acquisition d’une licence, etc.

Surtout, argumentent d’autres sources, la décision d’attribution de la licence de téléphonie mobile émanant des institutions compétentes doit précéder ce déploiement de David Nkotto Emane. «L’ouverture du marché est encadrée par un comité interministériel chargé du pilotage de l’ouverture du marché de la téléphonie mobile. Donc, déjà par rapport à cet aspect, le Dg de Camtel ne devait pas, de manière unilatérale, publier ce communiqué. Il y a vice de forme. C’est le gouvernement qui décide du nombre de licences, en fonction des besoins du marché. Le comité s’occupe du processus et toute autre démarche de passage en force n’aurait pas de base légale », argumente ce proche du dossier.

Le comité est composé, entre autres, de responsables du ministère des Postes et Télécommunications (Président), du ministère des Finances (Vice-président), de la Primature , du ministère de l’Economie, du ministère de la Justice , de la présidence de la République , de l’Agence de régulation des télécommunications, et de bien d’autres structures étatiques. Une composition qui montre à suffisance la sensibilité de la question de l’attribution des licences, qui doit faire l’objet d’un consensus entre toutes ces autorités.

Une simple question de forme que le Minpostel n’a pas pu gérer dans le cadre de son cabinet sans laisser éclater au grand jour le scandale ? En tout cas, sur ce dossier, le gouvernement, qui devrait avoir la posture de catalyseur, donne le sentiment de freiner l’éclosion des intérêts camerounais dans le secteur des télécoms. Un sentiment renforcé par l’absence de toute explication dans le communiqué diffusé hier par Jean-Pierre Biyiti bi Essam, et, surtout, par le refus de son administration de donner des explications pour éclairer l’opinion sur les motivations de la décision ministérielle.

Un sortilège frappe Camtel

D’une manière générale, la position du gouvernement telle qu’exprimée lors de la présentation du programme économique au parlement, en novembre 2011, reste assez floue : saluant les petits pas de l’entreprise publique, mais hésitant vraisemblablement à lui laisser les moyens de faire le grand saut : « en ce qui concerne Cameroon Telecommunications (Camtel), compte tenu de la pression de la concurrence, il a été décidé de lui permettre d’investir dans les infrastructures en vue d’une prise en charge optimale des besoins du marché en termes de capacités et d’offres large bande notamment dans le segment de la téléphonie mobile. Dans cet esprit, la construction d’un Backbone national de transmission en fibre optique de 3.200 km lancée en 2010, a été achevée. Cette artère permettra que chacune des 10 régions du Cameroun soit raccordée par une liaison en fibre optique. De même, l’extension du réseau CDMA/CITYPHONE par l’adjonction de 350.000 lignes nouvelles a été lancée. Pour ce qui est de l’avenir de CAMTEL, l’étude engagée en concertation avec la Banque Mondiale a permis d’identifier plusieurs scénarios de repositionnement possibles. Durant l’année 2012, les autorités adopteront le scénario le plus pertinent et le plus réaliste. S’agissant du marché de la téléphonie mobile qui dispose encore d’un important potentiel de croissance, le Gouvernement a lancé le processus d’attribution de nouvelles licences. Le Conseiller du Gouvernement a été recruté et le processus d’appel à la concurrence a déjà démarré».

C’est depuis le 16 mai 2006, à l’occasion de l’assemblée générale constitutive de Cameroon Mobile Telecommnications S.A. (C.M.T.S.A) que la Camtel , détentrice de 90% des parts (le reste étant détenu par la Société nationale d’investissements) rêve de lancer un réseau de téléphonie mobile. Il faut dire à ce sujet qu’en Afrique, la plupart des opérateurs historiques des télécommunications exploitent depuis près de 10 ans une licence de téléphonie mobile, et leurs réseaux sont parmi les plus courus de leurs pays respectifs. Au Cameroun par contre, il y a comme un sortilège qui frappe la Camtel , dont la privatisation échoue depuis près de 15 ans, du fait de toutes sortes d’atermoiements, et dont la filiale mobile n’a toujours pas démarré ses activités six années après sa création.

Source : La Nouvelle Expression

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